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Navigation 1: les bases

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Table des matières

Dès que l’homme cherche à se déplacer, que ce soit à pied, à cheval, en voiture, en bateau ou en avion, le premier problème qui se pose est de choisir la route à suivre. Pas très compliqué si le trajet est court, que l’on connait bien le terrain et que l’on dispose de nombreux points de repaire. Le problème se complique si l’on veut aller très loin, traverser un océan ou un désert, s’il fait nuit ou que l’on survole une couche nuageuse. C’est tout l’objet de la navigation dont on va étudier ici les bases…

RAPPELS SUR LA TERRE

Avant de chercher à se déplacer sur notre planète, revoyons tout d’abord quelques notions de base sur sa géographie.

Notre terre est un ellipsoïde de révolution assimilable, pour simplifier, à une sphère de 6337 km de rayon moyen. La différence entre le petit axe et le grand axe est d’environ 22 km, le périmètre moyen est proche de 40 000 km.

La terre tourne sur elle-même, autour de son axe Nord Sud, en 24 heures, et autour du soleil en 365 jours. L’axe des pôles est incliné de 23°27’ par rapport au plan de l’écliptique, ce qui est à l’origine des saisons.

 

Pour permettre le repérage des positions, il a été imaginé différents systèmes. Le plus connu et le plus courant est celui qui, grâce à l’équateur, sépare la terre en deux hémisphères. Parallèlement à cet équateur sont définis des parallèles qui définissent la latitude L. Elle est comptée de 0° à 90° vers le Nord ou vers le Sud.

Les méridiens sont des demi-grands cercles (dont le centre est le centre de la terre) qui joignent les deux pôles. Le système international actuel a fixé le méridien de Greenwich comme méridien origine (il passe tout près de Deauville). La longitude G est comptée vers l’est ou vers l’ouest à partir de ce méridien origine, jusqu’à 180°.

 

La combinaison latitude/longitude constitue les coordonnées géographiques d’un point, exprimées en degrés, minutes et secondes angulaires.

 

Tous les grands cercles, comme l’équateur, mesurent donc environ 40 000 km, les méridiens environ 20 000 km. Rappelons que, par définition, une minute d’arc de méridien mesure un mile nautique, soit 1852 m. C’est pourquoi en marine comme en aviation, on mesure les distances en miles nautiques (ou miles marins, nautical miles), et les vitesses en nœuds (miles nautiques par heure). Il sera donc toujours facile de mesurer une distance sur une carte, en la reportant sur le méridien le plus proche, et en comptant les minutes de latitude… Mais attention, pas sur les parallèles, sous peine de faire de graves erreurs !!!

 

Les parallèles ne sont pas des grands cercles. Leur rayon, et donc leur circonférence, diminuent quand la latitude augmente, jusqu’à être nuls au pôle.

 

Pour les matheux, et sans rentrer dans une démonstration mathématique complexe, en se souvenant simplement que le cosinus de la latitude diminue de 1 à 0 quand celle-ci augment de 0° à 90°, intuitivement on retiendra que la longueur d’un arc de parallèle varie en fonction du cosinus de sa latitude…

 

L’ESTIME  (dead reckoning)

C’est la base de toute navigation. Et c’est toujours d’actualité puisque les moyens de navigation les plus modernes ne font rien de plus mais avec la grande précision que permet la technologie actuelle, nous en reparlerons quand nous nous intéresserons à ces outils.

 

Quelque soit notre moyen de transport, pour aller au point B en partant du point A, il faut commencer par diriger, ou orienter notre véhicule vers le point B. C’est le plus important mais ce n’est pas forcément le plus simple : rappelons nous de Christophe Colomb parti cap à l’ouest pour aller aux Indes…!

 

Il faut donc être capable de dire dans quelle direction se trouve B, et par rapport à quelle référence, en général la direction du pôle Nord. C’est l’angle de route vraie Rv, exprimé en degrés par rapport au Nv, dans le sens horaire.

Si on voit B de A, c’est facile  mais c’est rare ! On peut aller de point visible en point visible, c’est ce que l’on fait en vol à vue. Si ce n’est pas possible, ou si l’on veut contrôler la navigation à vue, il faudra le mesurer sur une carte ou le calculer…

 

Ensuite il faudra connaître la distance à parcourir pour rejoindre le point B, ou bien un point intermédiaire si on en a défini. On pourra ensuite évaluer le temps de vol pour effectuer ce parcours en divisant cette distance par la vitesse par rapport au sol.

 

L’angle de route Rv et le temps de parcours seront les deux éléments qui nous permettrons de naviguer « à l’estime ». On dit aussi « le cap et la montre ».

Parmi les moyens les plus couramment utilisés pour déterminer les deux éléments de l’estime que sont l’angle de route et la distance on trouve, bien sûr, les cartes.

 

LA CARTOGRAPHIE

Plein de raisons, dont la navigation, ont conduit à vouloir représenter la Terre. Mais il est bien difficile de le faire fidèlement, en raison notamment de sa forme pas très … catholique  (cf. Galilée et Copernic) !

La représentation la plus fidèle est la mappemonde : forcément d’une très grande échelle, et vraiment pas pratique à utiliser en avion !!!

Généralités

Pour les cartes, représenter un objet vaguement sphérique sur une feuille de papier plate n’est pas possible avec précision : il faudra donc faire des compromis, et choisir quels sont les éléments à reproduire fidèlement au détriment d’autres qui le seront moins voire pas du tout !

Pour la navigation, un des points les plus importants, on vient de le voir, c’est l’orientation de la trajectoire avec l’angle de route Rv.

La conformité

Il faut donc que l’on puisse mesurer les angles avec précision : c’est ce que l’on appelle la conformité. Sur une carte conforme, si deux lignes se coupent sous un angle de 47° sur terre, leurs représentations sur la carte se couperont également sous un angle de 47°. Les angles sont donc conservés.

Pour qu’une carte soit conforme il faut qu’autour d’un point donné de la carte l’échelle soit constante dans toutes les directions, et notamment dans les deux directions perpendiculaires que sont méridiens et parallèles.

Pourquoi est-ce si important de mesurer les angles avec précision?

Avec un seul petit degré d’erreur, au bout de 60 Nm l’écart est de 1 Nm par rapport à la route ! Et 60 Nm c’est 30 mn en C172, mais à peine 8 mn pour un Jet en croisière ! Et les sources d’erreur sont multiples : mesure, erreur des instruments de navigation, dérive due au vent, etc…

La droite carte

Ensuite, ce serait bien si en traçant, sur la carte, un trait avec une règle on définissait la trajectoire que l’on veut suivre, orthodromie, loxodromie ou autre « dromie », on va y revenir.

L’équidistance

Et enfin, pour mesurer les distances, si l’échelle était constante sur toute la carte (on dirait alors qu’elle est équidistante), ce serait parfait ! En fait, comme on vient de le voir, ce n’est pas un gros problème sachant qu’on pourra toujours mesurer une distance en la reportant sur le méridien le plus proche et en comptant les minutes de latitude, autrement dit les miles nautiques !

Avoir ces trois qualités avec précision est impossible : les cartes aéronautiques seront donc d’abord conformes. Pour le reste, il faudra choisir le compromis le mieux adapté.

LA CARTE MERCATOR

Mise au point en 1569 par Gerardus Mercator qui lui a donné son nom, c’est certainement la représentation du monde la plus connue.

Caractéristiques

Il s’agit d’une projection cylindrique tangente à l’équateur. Pour autant, il ne s’agit pas d’une projection géométrique : l’écartement des parallèles est calculé mathématiquement pour que la carte soit conforme, et donc utilisable en navigation (latitudes croissantes, primitive de 1/cos L).

 

Les parallèles et les méridiens sont représentés par des droites perpendiculaires entre elles : c’est très pratique pour naviguer à cap constant car si on trace un trait sur la carte, le Rv est la même tout au long de la route : la route ainsi tracée s’appelle une loxodromie.

 

L’échelle est par contre très variable, ce qui déforme considérablement les surfaces : le Groënland , avec ses 2 millions de Km² semble aussi vaste que l’Afrique toute entière qui en fait environ 15 fois plus !!!

L’échelle est minimale à l’équateur et augmente en remontant vers les pôles.

Il n’est pas possible de représenter les zones polaires sur une carte Mercator.

 

La route de Paris à San Francisco indiquée sur les planisphères des compagnies aériennes fait une belle boucle au dessus du Groënland et la baie d’Hudson au Canada, alors que la ligne droite passerait au dessus de New-York ??? Ceux qui ont eu la chance de faire un vol vers la côte ouest des USA peuvent confirmer que l’on survole bien le grand Nord.

En fait, la loxodromie n’est pas la route la plus directe : la ligne droite sur notre terre sphérique est en réalité un arc de grand cercle (dont le centre est celui de la terre) passant par nos deux points A et B. Pour en avoir une confirmation, sur une mappemonde, en tendant un fil entre Paris et San Francisco on matérialisera la route la plus courte. C’est ce qu’on appelle une orthodromie.

Pour fixer les idées, la distance orthodromique entre CDG et SFO est de 4836 Nm alors que la distance loxodromique est d’environ 5600 Nm : 800 Nm, la différence n’est pas mince !!!

 

Construire précisément une carte Mercator est une affaire de professionnels : merci l’IGN. Par contre, on peut facilement en construire un petit morceau graphiquement.

Construire une carte Mercator

Pour illustrer cela, je vous propose un petit exercice pratique  :

Imaginons que vous héritiez de votre grand-mère une belle somme d’argent et un grand terrain situé dans le sud-ouest, aux environs du 45°N et 1°30 E. Avec l’argent vous décidez d’acheter un ULM, et avec le terrain de faire une piste pour l’utiliser… Vous voulez en faire la carte VAC, à la fois pour connaître le QFU et la longueur de piste, et aussi pour le faire connaître à d’autres usagers.

 

Tracez d’abord un rectangle de 12 cm de hauteur et 14 cm de largeur. Les côtés verticaux seront les méridiens, les horizontaux les parallèles de notre carte Mercator.

Graduez le côté vertical gauche de cm en cm. On va fixer l’échelle : 1 cm = 1 Nm.

 

Tracez une droite issue du coin en bas à gauche, et formant un angle de 45°, la latitude de notre terrain, avec le parallèle du bas. On peut aussi le faire en traçant la diagonale d’un carré…

Sur cette droite, reportez les 10 cm de méridien représentant 10 minutes de latitude, donc 10 Nm. Abaissez une droite verticale sur le parallèle du bas. Nous venons de délimiter la longueur d’un segment de 10 minutes de longitude : comme on l’a vu plus haut, il mesure 10 x cos 45° soit environ 7 Nm, donc 7 cm sur notre carte. ( cos 45° = 0,707, comme le sinus d’ailleurs, le plus aéro des sinus !!!).

L’échelle est donc la même sur le méridien et sur le parallèle : notre canevas est donc bien conforme !

 

Vous comprenez mieux pourquoi j’ai choisi un rectangle de 14 cm de largeur… qui représentent donc 20 minutes de longitude.

Il ne reste plus qu’à graduer notre échelle de longitude tous les 7 mm.

Pour avoir notre piste à peu près centrée, on va chiffrer les latitudes de 44°56’ à 45°58’N, et les longitudes de 001°20’ à 001°40’E.

Nous venons de réaliser un canevas conforme (même échelle sur les méridiens et les parallèles). C’est un canevas Mercator puisque que les méridiens et les parallèles sont des droites perpendiculaires !!!

 

Avec votre GPS, vous êtes allé mesurer la position des deux QFU : au NO : 45°02.6 N et 001°28.3 E et SE 45°02.2 N et 001°29.8 E. Il ne reste plus qu’à les positionner sur notre carte.

Avec un rapporteur vous pouvez maintenant mesurer les QFU, et avec un double décimètre la longueur de la piste : j’ai trouvé, pour ma part, les QFU 114°/294° et une longueur de piste de 1.15 cm, donc 1.15 Nm, soit 2130 m.

 

En fouillant un peu dans les fiches du SIA, vous trouverez facilement que votre grand-mère vous a, en fait, légué le terrain de Brive Souillac, dont les QFU sont 115°/295° et la longueur de piste 2100 m !!!

En aéronautique

La projection Mercator est très peu utilisée pour les cartes de navigation aéronautique. Seules les régions équatoriales permettront d’avoir une carte à la fois conforme, bien sûr, mais également pratiquement orthodromique et équidistante puisque proche de l’équateur.

Ce routier AFRICA 1 destiné à la planification des vols ETOPS en fait partie, bien que ce ne soit pas vraiment une carte de navigation (cliquez pour agrandir).

LA CARTE LAMBERT

Un des défauts majeurs de la carte Mercator est que la ligne droite sur la carte ne représente pas la ligne droite sur terre. Mais des solutions existent… la première s’appelle la carte Lambert.

Caractéristiques

Présentée à la fin du XVIII ème siècle par le mathématicien alsacien Johann Henrich Lambert, il s’agit d’une projection conique conforme qui tangente la sphère terrestre le long d’un parallèle. Comme pour la carte Mercator, il ne s’agit pas d’une projection géométrique mais d’une construction mathématique.

Les méridiens sont représentés par des droites qui convergent vers le pôle. On appelle facteur de convergence K le rapport entre l’angle que forment deux méridiens sur la carte et l’angle qu’ils forment sur terre.  Si le parallèle de tangence est de latitude Lo, le facteur K = sin Lo.

Les parallèles sont représentés par des cercles concentriques.

Comme toutes les cartes conformes, ce type de carte est pratiquement orthodromique à proximité du parallèle de tangence, c’est à dire que la droite carte est pratiquement la représentation d’une orthodromie. La carte Mercator est, en fait un cas particulier de la carte Lambert où le parallèle de tangence est l’équateur ! Elle sera donc orthodromique à proximité de l’équateur.

Pour avoir une carte Lambert orthodromique il suffira donc de choisir un parallèle de tangence centré sur la zone que l’on souhaite représenter…

Comme pour la carte Mercator, l’échelle est minimale au parallèle de tangence Lo et augmente sensiblement dès qu’on s’en éloigne.

Pour remédier à cet inconvénient, on a créé des cartes coniques Lambert dites « sécantes ». L’échelle officielle de la carte n’est réelle qu’au niveau de deux parallèles situés de part et d’autre du parallèle de tangence. Ça revient à dire que le cône de projection vient couper la surface de la terre suivant ces deux parallèles dits « standards » ou « d’échelle conservée ». L’échelle est légèrement plus petite entre ces deux parallèles et un peu plus grande au delà, ce qui donne un canevas pratiquement équidistant sur plus large superficie !

Le facteur K est alors le sinus de la latitude moyenne entre les deux parallèles standards, où à peu près car la variation d’échelle n’est pas symétrique de part et d’autre du parallèle de tangence.

 

La plupart des cartes aéronautiques utilisées dans nos régions de latitude moyenne sont de ce type. Ainsi on peut lire sur la carte VFR au 1/500 000 ème du nord-ouest de la France éditée par l’IGN : « Projection conique conforme de Lambert. Parallèles d’échelle conservée 45°54’ et 47°42’ » (les parallèles standards).

Ça fait une latitude moyenne Lo = 46°48’ N et donc un facteur K = 0.728.

En aéronautique

Voici, par exemple, un extrait du routier ATLAS 55C utilisé pour les traversées de l’Atlantique Nord (ici un vol Paris-New York), et dont les parallèles standards sont les 37° et 65° N (cliquez pour agrandir).

On voit très bien les méridiens, représentés par des droites, qui convergent vers le pôle Nord, et les parallèles qui sont représentés par des cercles concentriques.

Avec ce genre de carte on est tout prêt de la carte parfaite : dans la zone représentée, elle est conforme pour mesurer précisément les routes ou les relèvements, orthodromique pour tracer à la règle les routes les plus courtes, et pratiquement équidistante puisque l’échelle varie peu : le saint graal du cartographe donc !

Curieusement, la carte « En route » du SIA, bien que cela ne soit pas indiqué, est une carte Mercator, ce qui est facilement vérifiable avec ses méridiens parallèles, alors qu’elle présente des airways définies par des radials de VOR, qui sont des orthodromies ???

Quel type de carte ?

Pour clore ce chapitre: essayons de déterminer quel type de canevas est utilisé par le SIA pour présenter les SID et STAR : prenons par exemple une des cartes SID de LFPG.

Avec une règle ou en approchant un parallèle du bord de l’écran, on voit que les parallèles représentés ne sont pas des droites. Et en mesurant l’écart entre deux méridiens en haut et en bas on constate qu’ils ne sont pas parallèles.

Ce n’est donc pas un canevas Mercator, certainement Lambert, mais la petite taille du morceau représenté ne permet pas de mesurer l’angle entre deux méridiens qu’il faudrait comparer à leur écart de longitude pour déterminer le facteur K et donc le parallèle de tangence…

Pour plus d’infos sur les cartes Lambert utilisées en France, on peut se reporter à la page Wikipédia  sur les cartes Lambert :

 https://fr.wikipedia.org/wiki/Projection_conique_conforme_de_Lambert

LES AUTRES TYPES DE CARTE

Avec la carte Mercator pour la région de l’équateur, et la carte Lambert pour les autres latitudes on a résolu presque tous les problèmes. Restent quelques cas particuliers qui ont donné lieu à l’invention de cartes (très) particulières.

 

La carte stéréographique polaire

Le premier de ces cas est  une carte faite pour représenter les régions polaires : c’est ce qu’on appelle le canevas stéréographique polaire. Il s’agit d’une projection sur un plan tangent au pôle. Et cette fois, on pourrait le construire véritablement par projection géométrique à partir du pôle opposé.

Cela nous donne une carte où tous les méridiens sont représentés par des droites partant du pôle sous la forme d’une rose de 360°. Les parallèles sont des cercles concentriques.

Cette carte est, bien sûr, conforme pour être utilisable en navigation. Elle est orthodromique à proximité de son point de tangence, le pôle.

L’échelle sera minimale au pôle, et augmentera en s’éloignant.

Son usage est donc limité à la représentation des régions polaires et des routes associées .  Voici un extrait du routier polaire ATLAS 90C :

La très forte convergence des méridiens et le manque de fiabilité des compas magnétiques dans les régions polaires (zone 6 micro teslas) rendent très délicat le suivi d’une route à cap constant. Pour ça, la carte comporte un quadrillage orienté suivant un Nord Grille pour naviguer à Route Grille Rg constante.

 

D’autres types de canevas ont été imaginés et utilisés dans le passé.

 

La carte Mercator Transverse

Partant de l’idée que l’équateur est un grand cercle, il a été conçu des cartes dites Mercator transverses faites sur le même principe que la Mercator directe, une projection cylindrique, mais ayant comme « équateur » le méridien de Greenwich et le méridien 180° (on peut également le faire suivant n’importe quel couple méridien et son antiméridien).

Cela donne un canevas qui va être conforme, bien sûr, et orthodromique de chaque côté de son équateur carte, qui sera d’ailleurs le seul à être représenté par une droite. Il faudra donc impérativement utiliser une grille avec des « pseudo parallèles » et des « pseudo méridiens »…

C’est sur ce modèle qu’avait été faite la carte Air France « France-Alaska » utilisée avant l’arrivée des systèmes de navigation par inertie INS et pendant la guerre froide, période pendant laquelle le survol de la Sibérie étant interdit, la route la plus courte vers le Japon passait par la région du Pôle Nord.

Usage réservé à des navigateurs professionnels car plutôt délicat à manier…!

 

La carte Mercator Oblique

Toujours plus fort, pourquoi ne pas faire une carte Mercator avec, pour équateur carte, n’importe quel grand cercle ?

C’est ce qu’on appelle une carte Mercator Oblique, encore moins simple à utiliser !!!

 

ORTHODROMIE OU LOXODROMIE ?

 

On l’a vu plus haut, il y a au moins deux trajectoires possibles entre un point A et un point B : la loxodromie et l’orthodromie.

Laquelle choisir ?

Ça va dépendre de différents éléments, et principalement du moyen de navigation que l’on va pouvoir utiliser.

Le plus simple, le compas magnétique, va permettre de suivre des loxodromies, à cap constant, à condition bien sûr de savoir le corriger de la déviation, la déclinaison et la dérive. Nous en reparlerons dans un article consacré aux moyens de navigation.

Comme nous le verrons aussi dans cet article, les moyens modernes font suivre des orthodromies…Par contre, suivre une orthodromie avec un compas n’est pas très facile car la Rv change tout le temps. Et les moyens modernes de navigation ne savent pas suivre une loxodromie !

Mais est-il très important de faire la différence ?

Tout d’abord, il existe certains cas où les deux sont confondues : l’équateur est à la fois une ortho et une loxo. De même, les méridiens sont des orthos (demis grands cercles) mais aussi des loxos puisqu’on les suit à Rv constante, 180° ou 360° !

Reste le cas général. Disons tout de suite que sur des segments de quelques dizaines de Nm comme on en trouve sur les airways, l’écart est insignifiant.

Essayons malgré tout de l’évaluer.

Convergence des méridiens

On appelle convergence des méridiens l’écart entre la Rv au début d’un segment d’ortho et la Rv à la fin de ce même segment.

Cette différence apparaît clairement sur ce schéma. La valeur de cette convergence peut être évaluée grâce à la formule suivante :

Conv = ∆ G x sin Lm

Dans cette formule, delta G représente l’écart de longitude entre A et B, et Lm est la moyenne de leurs latitudes.

On voit tout de suite que si l’écart de longitude est faible, la convergence sera très faible (voir nulle sur un méridien comme déjà vu). Elle sera par contre maximale pour un trajet Est/Ouest ou inversement.

De même, si la latitude moyenne est faible, la convergence le sera aussi. Donc dans les régions équatoriales, l’orthodromie sera pratiquement une loxodromie et inversement !

Donc on peut déduire de cette formule que la convergence sera significative pour des segments de route orthodromique à la latitude moyenne assez élevée et avec un écart de longitude important.

Correction de Givry

La Rv de la loxodromie, constante par définition, reliant ces deux mêmes points sera, en première approximation, la moyenne des deux routes vraies départ et arrivée de l’ortho correspondante. L’écart de la  Rv loxo avec la Rv départ de l’ortho sera donc la moitié de la convergence.

Cette valeur, aussi appelée correction de Givry, du nom de l’ingénieur hydrographe qui en est l’auteur, permet, par exemple, de tracer l’ébauche d’une orthodromie sur une carte Mercator.

 

Pseudo Givry

De la même façon, il existe une « pseudo-givry » qui permet d’évaluer, sur une carte Lambert, l’écart entre l’orthodromie et la droite carte (map line).

 

Cette formule, un peu compliqué j’en conviens, permet surtout de montrer que si la route se situe près du parallèle de tangence Lo, la différence des sinus est pratiquement nulle, et donc la pseudo-givry aussi, ce qui permet de dire que la droite carte est pratiquement une orthodromie.

Le parallèle de tangence d’une carte Lambert, ou les parallèles standards d’une carte Lambert sécante, seront choisis de telle sorte que, dans la région représentée, la carte soit pratiquement orthodromique.

 

Les éléments d’une loxodromie, Rv et distance, s’ils sont faciles à mesurer sur une carte Mercator, sont plutôt compliqués à calculer avec une grande précision. A l’inverse, l’orthodromie n’est pas très simple à représenter sur une carte avec une grande précision et donc à mesurer, mais il est assez facile de calculer, grâce à la trigonométrie sphérique dans un triangle de position, Rv départ et arrivée et distance orthodromique. Comme en plus c’est la route la plus directe, il n’est donc pas étonnant que les calculateurs de navigation modernes nous fassent suivre des orthodromies !

Exercice d’application

Pour terminer et récapituler un peu tout cela, je vous propose un petit exercice d’application.

Vous faites un vol dans le grand Nord canadien, qui vous fait suivre la route est/ouest qui passe à la verticale de Resolute Bay. Voici représenté, sur une carte stéréographique polaire, le segment de route sur lequel vous vous trouvez (cliquez pour agrandir).

Oui, une route Est/Ouest représentée par un trait presque vertical, c’est pas très courant !!! La carte stéréographique polaire, il faut s’y habituer…

La convergence des méridiens est très importante puisque, comme on le voit sur la carte, sur ce segment, la Rv départ est de 283°(283T) et la route Rv arrivée à Résolute Bay est de 261° (inverse de 081T indiqué comme Rv départ en sens inverse). Pas moins de 22°, résultat que l’on pourrait également vérifier par le calcul en multipliant l’écart de longitude, environ 23°, par le sinus de la latitude moyenne, environ 75°.

Dans cette région polaire où la composante horizontale du champ magnétique terrestre est très faible, inférieure à 6 microteslas, vous avez calé vos compas au Nord vrai.

 

Vous avez passé le point N74°31,0 W072°00,0 depuis un bon moment, et peu après avoir croisé le 080W vous commencez à recevoir le VORDME de Resolute Bay, YBR. Celui-ci est calé, comme les autres VOR canadiens situés dans la zone des 6 microteslas, au Nord vrai (True indiqué à côté de la fréquence).

 

 

Oui,  puisque la Rv départ de ce segment, pris en sens inverse, est 081T comme indiqué sur la carte. Les ondes radio des VOR se déplaçant en ligne droite, l’avion se trouve bien sur l’orthodromie qui a pour Rv arrivée à YBR 261°.

 

A ce moment, vous décidez de guider l’avion avec la fonction Hdg Sel. Le vent est nul.

 

Non. Si on maintient le cap vrai 261° constant, l’avion va partir au sud de la route. Pour suivre la route prévue, il faudrait prendre un cap plus fort…

 

Non. On ne survolera pas Resolute Bay car, en maintenant constant le cap 272°, l’avion partira au nord de la route.  Pour suivre le radial, il faudrait progressivement diminuer le cap pour arriver à 261° à YRB.

 

La Rv constante sera la moyenne des Rv départ et Rv arrivée :

  (283 + 261)/2 = 272°

On trouve le même résultat en appliquant la correction de Givry à la Rv départ :

 g = ½(23 x sin 75°) = 11°

  Rv cte = 283 – 11 = 272°

 

CHOISIR UNE ROUTE

Reste maintenant à choisir entre orthodromie ou loxodromie. On l’a déjà vu, ce choix n’aura une certaine importance que sur un long trajet, et à fortiori si la tendance est/ouest est importante.

Alors comment faire ? Pour les exploitants d’avions de ligne, très gourmands en carburant, la route idéale est ce qu’on appelle le RTM pour Route de Temps Minimum.

Sans vent, la RTM c’est l’orthodromie. Mais il est illusoire d’espérer faire un long vol sans subir le moindre vent…

 Il existe une méthode graphique pour rechercher, en fonction des vents prévus, quelle serait la RTM. C’est ce qui se faisait autrefois, à la main, c’était le métier des agents d’opérations ou autres dispatchers.

Aujourd’hui, ils disposent de logiciels dont la puissance de calcul permet d’évaluer toutes les routes possibles en quelques instants…

On ne dispose malheureusement pas de ce genre d’outil pour nos vols simulés, mais certains logiciels donnent un résultat assez similaire et très acceptable.

Tout ceci sera abordé dans les articles à suivre…

CONCLUSION

Ce premier volet de l’étude de la navigation fixe les bases qui vont permettre de mieux comprendre comment se pratique la navigation sur un vol long courrier.

Dans les prochains articles, nous étudierons les différents moyens de navigation, comment sont élaborés les plans de vol et comment se déroule un vol long courrier.

Bons vols à tous.

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